Loi Sapin 2 : qui est concerné ? (MAJ 2024)
Le cadre légal de la lutte anticorruption a été renforcé en France par l’entrée en vigueur de la loi Sapin 2 qui prévoit de lourdes sanctions administratives, financières et pénales en cas de manquement, à la fois par les entreprises et les personnes physiques.
Les Directions Achats, RSE et Juridiques, les Compliance Officers, les organismes publics ainsi que les dirigeants de PME et ETI mobilisent la plateforme Provigis pour consolider leurs dispositifs anticorruption et stimuler leur croissance en toute sécurité.
Dans cet article, nous explorons la genèse, le champ d’application et les obligations de la loi Sapin 2..
Qu’est-ce que la loi Sapin 2 ?
La loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, dite loi Sapin 2 (ou la loi Sapin II), est entrée en vigueur le 1er juin 2017 pour renforcer la transparence dans le monde des affaires, lutter contre la corruption et moderniser la vie économique.
Cette réforme d’envergure tire son nom de Michel Sapin, ministre de l’Économie et des Finances en exercice au moment de sa promulgation.
Les origines et la raison d’être de la loi Sapin 2
La loi Sapin 2, qui fait suite à une première mouture entrée en vigueur en 1993, a été motivée par la volonté du législateur de hisser la France aux meilleurs standards internationaux en matière de gouvernance et de transparence.
Elle intervient également dans un contexte marqué par une série de scandales financiers et de corruption très médiatisés en France, notamment l’affaire Cahuzac, les révélations des Panama Papers et l’affaire dite « Air Cocaïne ».
La loi Sapin 2 et l’Agence Française Anticorruption (AFA)
Lancée en 2017 dans le cadre de la loi Sapin 2, l’Agence Française Anticorruption (AFA) est une autorité administrative indépendante qui succède au Service Central de Prévention de la Corruption (SCPC) pour veiller à la prévention et à la détection des actes de corruption, de trafic d'influence, de détournement de fonds publics et des infractions assimilées.
L’AFA accompagne les personnes morales de droit public et privé dans la mise en œuvre de leurs dispositifs internes de prévention de la corruption et effectue des contrôles pour s'assurer que les entreprises respectent les obligations imposées par la loi Sapin 2, notamment celles relatives à l'établissement de procédures internes pour prévenir la corruption.
L'agence fournit également des conseils aux entreprises et aux administrations pour les aider à élaborer et à renforcer leurs programmes de conformité à travers des guides, des formations et des recommandations sur les meilleures pratiques en matière de bonne gouvernance et lutte contre la corruption.
En cas de non-conformité aux normes établies, l'AFA a le pouvoir d’imposer des sanctions administratives. Elle peut également saisir le procureur de la République si des indices de corruption sont découverts lors de ses contrôles.
Loi Sapin 2 : quelles sanctions ?
La loi Sapin 2 distingue deux types de manquements qui engagent la responsabilité de l’entreprise et de ses dirigeants, conformément à l’article 17.
Le défaut de mise en application du cadre anti-corruption
L’AFA prévoit des sanctions administratives en cas de manquement de l’entreprise à son obligation de mettre en œuvre le programme anti-corruption, constaté à l’occasion d’un audit. La Commission des sanctions prononce, dans l’ordre :
- Un avertissement ;
- Une injonction à se mettre en conformité dans un délai inférieur à trois ans ;
- Une amende financière qui peut atteindre 200 000 € pour une personne physique et un million d’euros pour une personne morale, avec la possibilité de rendre la décision publique.
Les faits avérés de corruption
Les personnes reconnues coupables de faits de corruption sont sanctionnées par le Code pénal et encourent une peine maximale de dix ans d’emprisonnement et une amende allant jusqu’à un million d’euros.
Les entreprises peuvent également être sanctionnées au pénal en vertu de la loi Sapin 2, par le biais de la justice transactionnelle. Le Parquet peut en effet « négocier » un montant avec l’instance dirigeante pour éviter les poursuites judiciaires… sans pour autant lever les sanctions administratives et financières :
- Une amende d’intérêt public allant jusqu’à 30 % du chiffre d’affaires ;
- Le déploiement d’un programme de mise en conformité sous l’égide de l’AFA ;
- L’indemnisation des victimes, le cas échéant.
Qui est concerné par la loi Sapin 2 ?
L’élargissement du champ d’application constitue l’une des principales évolutions de la loi Sapin 2 par rapport à la première mouture, avec l’intégration des entreprises du secteur privé, des lobbyistes et des lanceurs d’alerte.
Les personnes morales concernées par la loi Sapin 2
La loi Sapin 2 concerne aussi bien les personnes morales de droit public et privé selon les modalités suivantes :
- Les entreprises privées, quelle que soit leur forme juridique, qui emploient plus de 500 salariés et dont le chiffre d’affaires (consolidé ou non) est supérieur à 100 millions d’euros ;
- Les filiales françaises ou étrangères dont la maison mère siège en France et répond aux deux conditions d’effectifs et de chiffre d’affaires précédemment mentionnées ;
- Toutes les entreprises publiques, sans distinction de taille ou de chiffre d’affaires ;
- Les administrations d’État, les collectivités territoriales et les établissements publics administratifs, sans critère de taille ou de chiffre d’affaires.
Les personnes physiques soumises à la loi Sapin 2
Le texte de la loi Sapin 2 évoque explicitement « les présidents, les directeurs généraux et les gérants », qui sont responsables de la conformité de l’entreprise aux obligations anti-corruption édictées par la loi, sous le contrôle de l’AFA.
Ils s’exposent, en cas de manquement, à une amende administrative pouvant aller jusqu’à 200 000 euros.
Citons également les fonctionnaires et autres agents de la fonction publique, directement concernés par les mesures de prévention et de lutte contre la corruption.
💡 Loi Sapin 2 : la question de la territorialité
La territorialité est l’autre différence clé de la loi Sapin 2 par rapport à la première mouture. Elle sanctionne les faits de corruption commis à l’étranger, y compris en dehors des frontières de l’Union européenne, par des personnes physiques de nationalité française, ou de nationalité étrangère mais qui résident en France.
Les TPE et PME, indirectement concernées par la loi Sapin 2
Par définition, les TPE et PME sont hors champ d’application de la loi Sapin 2 car elles ne répondent pas aux critères de taille et de chiffre d’affaires.
En revanche, dans un contexte réglementaire toujours plus contraignant sur la conformité des tiers, les TPE et PME ont tout intérêt à prendre des mesures volontaires en matière de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, à la fois pour rassurer leurs partenaires commerciaux et financiers et consolider leur image de marque.
Le cas des lobbyistes et représentants d’intérêt
En France, la définition légale d'un lobbyiste, ou représentant d'intérêts, est encadrée par la loi Sapin II. Sont ainsi considérés comme des lobbyistes :
- Les personnes morales de droit privé, les établissements publics ou groupements publics exerçant une activité industrielle et commerciale, les chambres de commerce et d'industrie, ainsi que les chambres des métiers et de l'artisanat dont un dirigeant, un employé ou un membre a pour activité principale ou régulière d'influer sur la décision publique, notamment sur le contenu d'une loi ou d'un acte réglementaire ;
- Les personnes physiques qui ne sont pas employées par une personne morale et qui exercent à titre individuel une activité professionnelle de lobbying.
Ces définitions excluent logiquement les élus dans l'exercice de leur mandat, les partis et groupements politiques, les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs, les associations cultuelles et les associations représentatives d'élus.
Les lobbyistes sont tenus de s'inscrire au répertoire des représentants d'intérêts tenu par la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) et accessible au public, et de déclarer leurs actions de lobbying ainsi que les moyens qui y sont consacrés.
Quelles sont les obligations de la loi Sapin 2 pour les entreprises ?
La loi Sapin organise les obligations pour les entreprises concernées en trois axes :
- Identifier et prévenir ;
- Agir et réagir ;
- Évaluer et actualiser.
1. Identifier et prévenir
La loi Sapin 2 impose aux entreprises qui entrent dans son champ d’application de mettre en œuvre un programme anti-corruption rigoureux basé sur les éléments suivants :
- Le code de conduite interne, un document intégré dans le règlement intérieur de l'entreprise et qui définit les comportements qui entrent dans la qualification de corruption ou de trafic d’influence. Il contient également l’engagement formel des instances dirigeantes de lutter contre la corruption dans l’entreprise ;
- La cartographie des risques, un document qui évalue les risques d'exposition de l'entreprise à des sollicitations externes de corruption. Ces derniers sont classés selon la gravité de leur impact et la probabilité de leur survenance ;
- L’évaluation de la conformité des tiers à loi Sapin 2, notamment les partenaires, les clients, les fournisseurs et les intermédiaires ;
- La formation des collaborateurs les plus exposés à des situations de corruption.
2. Agir et réagir
Sous cet axe, les entreprises sont tenues d'instaurer des mécanismes efficaces pour répondre rapidement et efficacement en cas de détection de faits de corruption ou de comportements non conformes au code de conduite :
- Procédure de signalement interne : mise en place de canaux sécurisés et confidentiels pour que les employés et les parties prenantes puissent rapporter les conduites suspectes ou les violations du code de conduite sans crainte de représailles (ligne téléphonique anonyme, portail web avec chiffrement des données, adresse email dédiée, entretiens confidentiels…). Cette procédure doit garantir la protection de l'identité des lanceurs d'alerte ;
- Procédure de gestion des alertes : mise en place d'un processus clair pour l'examen et le traitement des alertes reçues, avec l'investigation rapide des allégations et, si nécessaire, la mise en œuvre de mesures disciplinaires ou correctives appropriées ;
- Politique de sanctions : mise en place et application de sanctions proportionnées et dissuasives en cas de violation avérée du code de conduite ou des lois anti-corruption.
3. Évaluer et actualiser
Cet section vise à garantir que le programme anti-corruption est dynamique et s'adapte aux évolutions de l'environnement interne et externe de l'entreprise :
- Audit et contrôle interne : réalisation régulière d'audits internes pour vérifier l'efficacité des mesures mises en place et identifier les éventuelles failles ou améliorations nécessaires ;
- Mise à jour de la cartographie des risques : réévaluation périodique des risques de corruption pour s'assurer que la cartographie reste pertinente avec les changements dans l'environnement de l'entreprise, les marchés, la réglementation, etc. ;
- Révision du programme de conformité : actualisation régulière des procédures, des politiques et des formations pour s'assurer qu'elles répondent aux défis actuels et futurs en matière de corruption et de conformité ;
- Formation continue : organisation de sessions de formation continue pour maintenir la sensibilisation et la compétence des employés face aux questions de corruption, notamment en intégrant les dernières évolutions légales et les meilleures pratiques.
Loi Sapin 2 : un durcissement est plus que probable
Une proposition de loi a été déposée le 19 octobre 2021 pour faire évoluer la loi Sapin 2 vers une troisième version à la suite d’un rapport d’évaluation critique publié le 7 juillet 2021 par la Commission des lois.
On y évoque le renforcement des obligations des services publics en matière de lutte anticorruption, le renforcement du rôle de la HATVP, l’extension du champ d’application géographique de la loi et l’harmonisation des obligations entre les secteurs public et privé.
Provigis vous accompagne
Pour aider les grandes entreprises et leurs dirigeants à se conformer à la loi Sapin 2 et préparer son durcissement probable, Provigis déploie trois solutions dans le cadre de sa plateforme digitale clé en main :
- Collecte et authentification des documents de conformité des tiers : code de conduite, assurance RCP, attestation d’absence de conflit d’intérêts, formulaire de déclaration des bénéficiaires effectifs, etc. ;
- Questionnaires et screening Sapin 2 ;
- Dispositif « lanceur d’alerte » pour la gestion simple et sécurisée des alertes et des enquêtes.
La FAQ de la loi Sapin 2 :
Quel est le champ d’application de la loi Sapin 2 ?
La loi Sapin 2 s'applique aux grandes entreprises privées employant plus de 500 salariés avec un chiffre d'affaires supérieur à 100 millions d’euros, ainsi qu'à leurs filiales.
Elle concerne également toutes les entreprises publiques, les administrations d’État, les collectivités territoriales et les établissements publics administratifs, sans critère de taille ou de chiffre d’affaires. Les dirigeants et certains fonctionnaires sont aussi directement visés par cette loi anticorruption.
Quels sont les trois piliers de la loi Sapin 2 ?
Les trois piliers de la loi Sapin 2 sont :
- Identifier et prévenir les risques de corruption ;
- Agir et réagir en cas d’incidents ;
- Évaluer et actualiser régulièrement les mesures anti-corruption.
Quelles sont les principales innovations apportées par la loi Sapin 2 ?
La loi Sapin 2 a introduit plusieurs innovations majeures comme la création de l'Agence Française Anticorruption (AFA), l'obligation pour les grandes entreprises de mettre en place un programme anti-corruption complet et l'extension du cadre légal de la lutte anti-corruption à des actes commis à l'étranger. Elle a également renforcé les sanctions en cas de non-conformité et élargi le rôle des lanceurs d'alerte.
Comment se mettre en conformité avec la loi Sapin 2 ?
Pour se conformer à la loi Sapin 2, les entreprises doivent développer un programme anti-corruption avec un code de conduite, une cartographie des risques, des procédures de contrôle des tiers, des formations dédiées et un système de signalement interne.
Elles doivent également assurer un suivi et une mise à jour continus de ces mesures pour s'adapter à l'évolution des risques et des régulations.