BlogConformitéSites industriels : comment lutter efficacement contre le travail dissimulé ?

Sites industriels : comment lutter efficacement contre le travail dissimulé ?

Pression réglementaire, environnements contraignants, configurations architecturales complexes, recours à la sous-traitance… les sites industriels sont exposés à un vaste spectre de risques qui pèsent sur la sécurité et la santé des travailleurs mais aussi la pérennité de l’activité, des accidents industriels au travail dissimulé en passant par la non-conformité des tiers. Décryptage…

Qu’est-ce qu’un site industriel ?

Un site industriel est un espace dédié à la production de biens ou à la prestation de services, généralement à grande échelle, caractérisé par l’utilisation d’équipements et de technologies avancées et par l’emploi d’une main-d’œuvre qualifiée. Il peut s’agir d’une usine, d’une raffinerie, d’une centrale électrique, d’un entrepôt, d’un laboratoire ou de tout autre lieu où des activités de production, de transformation, de stockage et/ou de distribution sont menées. Il peut être situé dans une zone urbaine, rurale ou périurbaine, et sa taille peut varier de quelques hectares à plusieurs kilomètres carrés.

Le site industriel est généralement structuré en plusieurs zones, chacune ayant une fonction spécifique : zones de production, de stockage, de maintenance, de recherche et développement (R&D), d’administration, et parfois des zones réservées au bien-être des employés (cantines, espaces de repos, etc.).

La conception et l’aménagement d’un site industriel sont déterminés par plusieurs facteurs, notamment la nature de l’activité industrielle, les besoins en matières premières et en énergie, les contraintes environnementales et réglementaires ainsi que les exigences en matière de sécurité et de sûreté.

Le site industriel n’est pas seulement un lieu de production. C’est aussi un acteur économique, social et environnemental à part entière qui contribue à la création de richesse et d’emplois, le plus souvent à l’échelle locale ou régionale, à l’innovation technologique, à l’aménagement du territoire, etc.

Enfin, un site industriel est soumis à un ensemble de règles et de normes qui régissent son fonctionnement, sa gestion et son contrôle. Ces règles couvrent des domaines aussi variés que la sécurité au travail, la protection de l’environnement, la qualité des produits et services, la conformité réglementaire, et la lutte contre le travail dissimulé.

Quelles sont les spécificités des sites industriels ?

Les sites industriels présentent plusieurs spécificités qui les distinguent d’autres types de lieux de travail ou d’activité. Ces spécificités sont liées à la nature de leurs activités, à leur environnement, à leur configuration architecturale et aux réglementations auxquelles ils sont soumis.

Sites industriels : une réglementation forte

Les sites industriels, par la nature de leurs activités, sont soumis à un cadre réglementaire particulièrement rigoureux et complexe. Ce cadre englobe un large éventail de réglementations qui visent à garantir la sécurité des personnes, la protection de l’environnement, la qualité des produits et services et le respect des droits des travailleurs.

Parmi ces réglementations, la directive SEVESO occupe une place centrale. Nommée d’après la catastrophe industrielle survenue en Italie en 1976, cette directive européenne vise à prévenir les accidents majeurs impliquant des substances dangereuses. Les sites industriels concernés par cette directive sont classés en deux catégories : « SEVESO seuil haut » et « SEVESO seuil bas », en fonction de la quantité et du type de substances dangereuses qu’ils manipulent. Cette classification implique des obligations spécifiques en matière de prévention des risques, de préparation aux situations d’urgence et de communication avec le public et les autorités.

En France, les sites industriels sont également soumis à la réglementation des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE). Elle concerne les installations qui peuvent présenter des dangers ou des nuisances pour la santé humaine, la sécurité, la salubrité publique, l’agriculture, la nature et l’environnement en raison de leur activité.

D’un autre côté, les sites industriels qui utilisent ou produisent des substances chimiques sont concernés par la réglementation européenne REACH (Registration, Evaluation, Authorisation and Restriction of Chemicals), qui vise à protéger la santé humaine et l’environnement contre les risques liés aux substances chimiques.

Enfin, les sites industriels qui emploient des travailleurs étrangers ou des travailleurs détachés sont tenus de respecter des obligations spécifiques en matière de droit du travail et de lutte contre le travail dissimulé, y compris auprès de leurs sous-traitants (obligation de vigilance).

Sites industriels : des environnements contraignants

Les sites industriels sont souvent situés dans des environnements contraignants, qui peuvent affecter leur fonctionnement et leur sécurité. Par exemple, ils peuvent être exposés à des conditions climatiques extrêmes (chaleur, froid, humidité, vents forts), à des risques naturels (inondations, séismes, glissements de terrain), ou à des nuisances environnementales (poussière, bruit, vibrations). Ils peuvent également être confrontés à des contraintes liées à l’approvisionnement en matières premières, en eau ou en énergie, ou à l’évacuation des déchets et des effluents.

Sites industriels : des configurations architecturales complexes

Elles peuvent compliquer la gestion des flux de personnes, de véhicules et de matières ainsi que la prévention des risques. Certains sites industriels peuvent par exemple disposer de plusieurs bâtiments ou installations reliés par des réseaux de voies de circulation, de canalisations ou de câbles. Ils peuvent également comprendre des zones à accès restreint, des zones à risques spécifiques (zones de stockage de substances dangereuses, zones de production à haute température), ou des zones sensibles (laboratoires, salles de contrôle).

Sites industriels : le point sur les risques et les responsabilités

Les sites industriels, de par leur nature et leur complexité, sont exposés à une multitude de risques :

  • Les sites industriels peuvent être exposés à des risques climatiques comme des tempêtes, des inondations, des séismes ou des incendies, qui peuvent endommager les installations et interrompre la production. Ils peuvent également être confrontés à des risques environnementaux comme la pollution de l’air, de l’eau ou des sols, qui peuvent affecter la santé des travailleurs et des populations environnantes, avec des conséquences sur la biodiversité et les écosystèmes.
  • Risques liés à la nature de l’activité :ils peuvent concerner la sécurité des travailleurs (accidents du travail, maladies professionnelles), la sécurité des installations (incidents techniques, pannes, explosions), la qualité des produits ou services (défauts, non-conformités) ou encore la conformité réglementaire (non-respect des normes et des réglementations, travail dissimulé…).
  • Risques d’actes malveillants : vols, sabotages, actes de vandalisme, attaques informatiques, etc. Ces actes peuvent avoir des conséquences graves non seulement en termes de pertes matérielles ou financières, mais aussi en termes de réputation et de confiance des clients, des partenaires et des autorités.

Face à ces risques, les responsabilités sont partagées entre plusieurs acteurs. Les pouvoirs publics ont la responsabilité de protéger la sécurité des populations et des territoires en définissant les normes et les réglementations, en contrôlant leur application et en intervenant en cas de crise ou d’accident.

Les propriétaires et les exploitants des sites industriels ont la responsabilité de garantir la sécurité et la sûreté des sites, en mettant en place des mesures de prévention et de gestion des risques, en formant et en informant les travailleurs et en assurant la conformité des activités et des installations.

Enfin, les travailleurs et les sous-traitants ont également une part de responsabilité, en respectant les règles et les consignes de sécurité, et en signalant toute situation dangereuse ou anormale.

Quels dispositifs pour évaluer les risques dans les sites industriels ?

Des dispositifs solides et efficaces doivent être mis en place pour évaluer et gérer les risques auxquels sont exposés les sites industriels. Ces dispositifs peuvent être regroupés en quatre grandes catégories : la prévention des risques industriels, l’anticipation et la facilitation de la gestion d’un accident, l’amélioration du suivi des conséquences sanitaires et environnementales et le renforcement des contrôles et des moyens d’enquêtes. Tour d’horizon.

#1 prévention des risques industriels

Elle repose sur l’identification et l’évaluation des risques, la mise en place de mesures de prévention et de protection ainsi que la formation et l’information des travailleurs. Elle implique la réalisation d’études de dangers, l’élaboration de plans de prévention, l’installation de dispositifs de sécurité (systèmes d’alarme, équipements de protection individuelle) et l’organisation de formations et de simulations d’accidents.

#2 anticipation et facilitation de la gestion d’un accident

On parle ici de la préparation aux situations d’urgence, de la mise en place de plans d’intervention et de secours et de la coordination avec les services d’urgence externes (pompiers, SAMU, forces de l’ordre). Il s’appuie des plans d’urgence interne et externe, des procédures d’alerte et d’évacuation et des exercices d’évacuation et de mise en situation.

#3 amélioration du suivi des conséquences sanitaires et environnementales

Ce dispositif repose sur la surveillance de l’environnement du site, le suivi médical des travailleurs et la communication avec les populations et les autorités. Il s’agira par exemple de mesurer la qualité de l’air, de l’eau et des sols, de réaliser des bilans de santé réguliers pour les travailleurs et de diffuser des informations sur l’état du site et les mesures prises en cas d’accident.

#4 renforcement des contrôles et des moyens d’enquêtes

Il s’agit notamment de l’inspection régulière des installations, du contrôle du respect des normes et des réglementations et de l’investigation des incidents et des accidents. Cela peut impliquer des audits internes et externes, des inspections par les autorités compétentes (DREAL, Inspection du travail) et la mise en place de procédures d’investigation et de retour d’expérience.

Ces dispositifs, mis en œuvre de manière coordonnée et systématique, permettent d’évaluer et de gérer les risques sur les sites industriels, de protéger la sécurité des personnes et de l’environnement et de garantir la conformité des activités et des installations.

La question du travail dissimulé dans les environnements industriels

Le travail dissimulé est une pratique illégale qui peut prendre plusieurs formes dans les environnements industriels. Il peut s’agir de l’emploi de travailleurs non déclarés, du non-respect des conditions de travail et de rémunération prévues par la loi et les conventions collectives, du non-paiement des cotisations sociales ou encore de l’emploi de travailleurs étrangers en situation irrégulière.

Ces pratiques, en plus de porter atteinte aux droits des travailleurs, représentent un risque majeur pour les entreprises. En effet, le travail dissimulé peut entraîner des sanctions financières et pénales sévères. Selon le Code du travail français, le fait de recourir sciemment, directement ou indirectement, au travail dissimulé est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende pour une personne physique, et de 225 000 euros d’amende pour une personne morale. Les peines peuvent être portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende lorsque le travail dissimulé est commis en bande organisée.

Aussi, le travail dissimulé peut avoir des conséquences graves sur la santé et la sécurité des travailleurs. Les travailleurs non déclarés, par exemple, ne bénéficient pas de la protection de la sécurité sociale en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle. Ils peuvent également être exposés à des conditions de travail dangereuses ou insalubres, sans bénéficier des protections et des droits prévus par le droit du travail.

Enfin, le travail dissimulé peut nuire à la réputation de l’entreprise et à sa relation avec ses clients, ses partenaires et les autorités. Une entreprise qui est reconnue coupable de travail dissimulé peut être exclue des marchés publics, voir sa responsabilité civile engagée et subir des dommages à son image et à sa réputation.

Face à ces risques, il est essentiel pour les entreprises de prendre des mesures pour prévenir et détecter le travail dissimulé et garantir le respect des droits des travailleurs et des obligations légales et réglementaires.

Le travail dissimulé chez les tiers des acteurs industriels

Dans le secteur industriel, le recours à des tiers (sous-traitants et travailleurs détachés) est une pratique courante. Cependant, cette pratique peut parfois donner lieu à des situations de travail dissimulé, avec toutes les conséquences que cela peut entraîner en termes de respect des droits des travailleurs, de conformité réglementaire et de réputation de l’entreprise.

En France, la loi impose aux donneurs d’ordre et aux maîtres d’ouvrage une obligation de vigilance vis-à-vis de leurs cocontractants. Selon le Code du travail (articles L8222-1 à L8222-5, L8251-1 et suivants, L8256-2, et R8251-1 et suivants), ils doivent vérifier, lors de la conclusion du contrat et tous les six mois jusqu’à la fin de son exécution, que leur cocontractant s’acquitte de ses obligations en matière de déclaration et de paiement des cotisations sociales.

Pour cela, ils doivent obtenir de leur cocontractant un certain nombre de documents, notamment une attestation de l’Urssaf, et, si le cocontractant emploie des travailleurs étrangers, une copie de la déclaration préalable à l’embauche.

En cas de manquement à cette obligation de vigilance, le donneur d’ordre ou le maître d’ouvrage peut être tenu de payer les salaires, les taxes et les cotisations sociales dus par le cocontractant défaillant. Il peut également être sanctionné pénalement, avec des peines pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende pour une personne physique, et 150 000 euros d’amende pour une personne morale, voire au-delà en cas de travail dissimulé ou d’emploi irrégulier de travailleurs étrangers (jusqu’à 500 000 €).

Cette obligation de vigilance est donc un outil essentiel pour lutter contre le travail dissimulé chez les tiers des acteurs industriels. Elle incite les donneurs d’ordre et les maîtres d’ouvrage à être vigilants et responsables vis-à-vis de leurs cocontractants, et contribue à garantir le respect des droits des travailleurs et des obligations légales et réglementaires.

Une approche à 360° pour lutter contre le travail dissimulé dans l’industrie

Pour lutter efficacement contre le travail dissimulé, les acteurs de l’industrie doivent déployer une approche à 360° qui s’articule autour de plusieurs éléments :

  • Collecte de documents : cette première étape consiste à recueillir tous les documents nécessaires pour vérifier la conformité des travailleurs (et des tiers). Il peut s’agir de contrats de travail, d’autorisations de travail pour les travailleurs étrangers, d’attestations de paiement des cotisations sociales, etc. ;
  • Qualification des données : une fois les documents collectés, ils doivent être analysés et vérifiés. Cette étape permet d’identifier les éventuelles anomalies ou irrégularités, comme des documents manquants, des faux documents ou des incohérences entre les documents ;
  • Contrôle sur site : il s’agit de vérifier sur le terrain la réalité de la situation des travailleurs, de contrôler le respect des règles de sécurité et de santé au travail et de détecter les éventuelles situations de travail dissimulé ;
  • Rapport et traçabilité des contrôles : enfin, les résultats des contrôles doivent être consignés dans un rapport qui sera archivé avec les documents associés. Cette étape assure la traçabilité des contrôles, ce qui est essentiel pour pouvoir justifier les actions entreprises en cas de contrôle par les autorités.

Pour mettre en œuvre cette approche à 360°, nous recommandons une solution tripartite. Provigis, en tant que Tiers de Collecte Probatoire, peut assurer la conformité des personnes morales (Scope Provigis) et vous outiller pour la piloter via une plateforme en ligne centralisée. De son côté, notre partenaire Bativigie assure la conformité des personnes physiques (Scope Activigie) et le contrôle de cohérence sur site (Scope Société Activités de sécurité privée).

En optant pour cette solution, les sites industriels peuvent renforcer leur lutte contre le travail dissimulé, garantir la conformité de leurs activités et leurs tiers et assurer la sécurité de leurs travailleurs et de leurs installations.

Rémi Lentheric

Au cœur des enjeux métiers des Directions Achats, notamment par l’animation du Club des Acheteurs (réseau CNA), j’accompagne les grandes entreprises et les PME dans l’utilisation de Provigis depuis plus de 10 ans en garantissant leurs processus de conformité fournisseurs. Notre service numérique Provigis s’inscrit en effet pleinement dans les démarches de digitalisation des Achats Responsables pour la prévention des risques et la pérennité des relations clients-fournisseurs. Je me tiens en permanence à l’écoute des clients, du marché et des organismes de référence dans le cadre d’une veille continue sur un contexte règlementaire en pleine mouvance.

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